Pardon pour cette très longue absence et merci à tout ce qui m'ont laissé un message et auxquels je n'ai pas répondu.
J'espère que vous aimerez cette suite qui va marquer un vrai tournent dans mon histoire.
Bonne lecture ! ^_^
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Aujourd’hui
Du côté de la réception, les convives commençaient déjà à former les couples, se préparant à l’apothéose de cette si belle journée. Isolé, Sebastian les observait tous en sirotant son verre de jus de fruit.
Bon sang ! J’ai hâte de rentrer, moi ! En effet, dur de passer un bon moment si personne ne daigne vous adresser la parole.
A part sa nièce, Lana, et quelques compliments mielleux sur sa prestation au violon accompagné de son fils, aucun des autres invités n’avaient pris la peine d’engager une conversation avec lui. Il y aurait bien eut sa femme, mais cette dernière trop polie et sociable - contrairement à lui - s’était lancée dans le rituel incontournable des présentations de la famille nouvellement unifiée. Au bout d’un moment, il ne put supporter d’avantage ces usages horriblement surfaits, à son goût, et laissa Jeanne à sa sœur pour les poursuivre.
Il avait parfaitement conscience de faire « tapisserie », mais ça… Il en avait l’habitude. Le rôle d’observateur ne lui déplaisait pas, au contraire. Toute sa vie, il s’était diverti en analysant scrupuleusement le comportement de ses semblables.
Comment distinguer un hypocrite de quelqu’un de sincère ? Comment voir qu’un être est sain d’esprit et un autre dérangé ? Comment distinguer le vrai du faux ?
Il fallait avouer qu’il était plutôt doué dans ce genre d’exercice.
- Chéri !
- Ah, te voilà ! Je croyais que j’allais danser tout seul !
- Mais voyons, Seb ! Arrête un peu de dire des bêtises, veux-tu ? Lui rétorqua-t-elle en plaisantant.
Malheureusement pour lui, elle n’était pas seule : elle était arrivée, flanquée de sa sœur et de son nouveau beau-frère.
- Sebastian ! Comment allez-vous ? Lui demanda ce dernier d’un ton enjoué. Enfin je dis « vous », mais on pourrait peut-être passer au « tu », non ?
Un « non, je ne crois pas » à peine audible lui échappa des lèvres. Seule Jeanne l’entendit et l’étouffa avec un léger coup de coude dans les côtes en rattrapant rapidement avec un sourire délicieux et diplomate.
- Mais oui, bien sûr qu’il en serait ravi. Elle tourna sa tête vers lui avec un air menaçant. N’est-ce pas, Sebastian ?
- Oui… Bien sûr. Tout à fait ravi. S’efforça-t-il de confirmer.
- Tu es toujours au jus d’orange, Sebastian ? Fit remarquer Stephan. Le champagne n’est pas à ton goût ?
- Oh non… Ce n’est pas ça…
- Depuis que je le connais, je ne l’ai jamais vu boire une seule goutte d’alcool. Interrompit Célia.
- Je vois. C’est pour des raisons… Religieuses ?
Si leur sens de la diplomatie n’était pas aussi fort, Jeanne aurait littéralement éclaté de rire tandis que Sebastian aurait répliqué qu’il ne croyait pas à « toutes ces conne… foutaises ». Mais diplomatie oblige : la politesse était de mise.
- Loin de là. Je dois t’avouer que Dieu et moi ne nous sommes jamais vraiment bien entendus.
- Tu es athée ?
- Est-ce un crime ?
- Non, bien sûr que non, je ne te juge pas. Je me posais juste la question, c’est tout.
- Et bien tu as eu ta réponse. Riposta sèchement Sebastian.
- En tout cas, tu sembles avoir déteint sur ma petite sœur. C’est vrai Jeanne, tu n’as pas bu une seule coupe de champagne de toute la journée.
La concernée parut légèrement gênée.
- Oui, c’est vrai. Il faut croire que je n’en avais tout simplement pas envie.
- Il faut croire que oui. Répéta Célia avec un soupçon de suspicion dans la voix.
- Le bal n’est-il pas sensé bientôt débuter ? Intervint Sebastian de manière chevaleresque.
- Tu as raison. Allons nous préparer, ma chérie. S’enquit Stephan.
Et ils s’éloignèrent aussitôt.
- Merci. Dit simplement Jeanne.
- De quoi ?
- Ne fais pas l’innocent, tu vois très bien ce dont je veux parler.
- Tu veux dire ce dont tu « ne veux pas parler », justement.
- Nous avons déjà eu cette conversation. Ce n’est ni le lieu, ni le moment.
- Je sais que nous avons encore des… choses à clarifier, Jeanne. Mais tu aurais pu au moins mettre ta mère et ta sœur dans la confidence. Elles n’ont pas cessé de demander de tes nouvelles, au cours de la journée.
- Et elles en auront. Mais pas aujourd’hui : le débat est clos.
Son ton ferme et définitif le dissuada de poursuivre.
- Bien. Dans ce cas, tâchons de bien nous amuser pendant le bal.
- Tu as raison. J’espère que tu danses toujours aussi bien. Lui lança-t-elle avec un ton de défi.
- Tu en doutes ?
- Non, je te taquine.
- En parlant de « s’amuser », où sont Ulrich et Yumi ?
- Je ne sais pas. Ça fait un moment que je ne les ai pas vus. J’imagine qu’ils ont voulus rester un peu tranquilles.
- Je suis là ! Indiqua Yumi, devinant qu’ils la cherchaient du regard.
- Ah ! Quand on parle du loup ! Plaisanta Jeanne.
- Ulrich n’est pas avec toi ? L’interrogea Sebastian.
- Non, il est avec Lana. Je crois qu’ils avaient besoin de se parler.
- Ah, Lana ! Soupira la mère d’Ulrich. Elle ne peut pas s’empêcher de jouer les « grandes cousines » !
- Oui, pauvre garçon ! Quand ce n’est pas toi qu’il a sur le dos, c’est sa cousine qui prend le relais. Fit Sebastian.
- Hé ! Je ne suis pas « sur son dos » comme tu dis ! Et puis tu peux parler, toi !
- Excusez-moi de vous interrompre. Intervint la japonaise amusée. Mais est-ce qu’ils ont toujours étaient… Aussi proches.
- Oui. Depuis tout petits déjà ils partageaient une relation assez fusionnelle. Confirma Jeanne nostalgique. Ma sœur et moi en étions ravies !
- C’est vrai. Bien qu’elle ait plusieurs petits frères qu’elle adore, malgré toutes les plaintes qu’elle puisse formuler, Ulrich tient une place équivalente, si ce n’est plus importante pour elle.
- Et c’est réciproque, bien entendu. Ils ont beau encore se chamailler comme des gamins, Ulrich ne jure que par elle ! Renchérit Jeanne.
- Oui, j’ai pu le constater il y a quelques heures. Rit Yumi en faisant référence à la scène à laquelle elle avait assisté juste après sa rencontre avec Lana.
Avant cette conversation, elle devinait déjà la complicité qui unissait son petit-ami à sa cousine. Mais ce qu’elle ignorait, c’était son intensité. Et bien que cela lui parut stupide et immature, un faible sentiment de jalousie commença lentement à poindre en elle. Elle secoua vivement la tête, comme pour s’extraire à cette pensée absurde, avant de reprendre le fil de la conversation avec ceux que son petit frère, Hiroki, s’amusait à surnommer « ses futurs beaux-parents ».
- Ça suffit, Lana ! Arrête de te mêler de mes affaires !
La discussion avait dégénéré. La jeune Deblois avait, sans le vouloir, attisé une flamme qui n’avait pas tardé à engendrer une véritable explosion.
- Tu comptes revenir en arrière, Ulrich ?! Garder le silence ?! Ou plutôt laisser le silence te garder en otage ! S’insurgea-t-elle avec une colère dans laquelle on pouvait déceler de l’inquiétude.
- Tout ça, c’est terminé maintenant ! Je vais bien, ok ? Et si je n’ai pas envie d’en parler c’est mon droit !...
- Oui, peut-être. Mais tu n’as pas celui de m’impliquer dans des mensonges !
- C’est pour cette histoire avec Maxence que tu me fais tout un plat ?!
- Oui ! Et c’est aussi parce que je constate que ça fait des années que tu me mens ! Des années que tu TE mens, Ric !
- Je ne mens à personne.
- Ne rien dire, c’est mentir par omission !
- Ne joue pas les procureurs avec moi, veux-tu ! J’y ai déjà droit quand mon père me fait des reproches, je n’ai pas besoin que tu t’y mettes aussi !
- Il faut bien que quelqu’un le fasse, Ric ! Ne pas vouloir en parler est une chose, la dissimuler en est une autre. C’est parce que tu n’es pas en paix avec toi-même que tu ne dis rien, pire : que tu racontes des mensonges…
- Je n’en ai dit qu’un seul, putain ! Lâche-moi, maintenant ! Explosa Ulrich qui commençait à être à bout.
- Je te connais bien. La vulgarité est ton arme quand tu sais que tu as tort ou que tu n’as rien d’autre à ta disposition pour te justifier.
- Je n’ai pas à me justifier de quoi que ce soit ! Je n’ai pas à faire étalage de ma vie à mes amis ou à ma copine juste parce que tu t’es autoproclamée psychiatre !
- Je ne prétends pas être « psy », Ulrich. Mais ce dont je suis sûre, c’est que je sais que quand tu enfouis tes sentiments… Tu souffres, comme je n’ai jamais vu personne d’autre souffrir autant dans toute mon existence !
Sa voix était partie dans les aiguës, à la limite des sanglots. Ceci révélait que sous sa force et son charisme impressionnant se cachait une fragilité que peu de gens lui connaissait. Son cousin était une des rares personnes à savoir ce qui se cachait sous l’élégance et le sarcasme qu’elle dégageait constamment.
- Je ne te fais pas la moral sur « mentir c’est mal » ou je ne sais quelle autre baliverne ! Je ne veux pas que tu reviennes en arrière, Ulrich ! Ce n’est pas ce que Matt aurait voulu !
- Arrête de parler de ça !
- Ah ! C’est encore pire que ce que j’imaginais ! Fit-elle en lâchant un rire nerveux. Tu as carrément des œillères, mon pauvre vieux !
- Ça suffit ! J’en marre de t’entendre débiter toutes tes conneries ! Essaya-t-il de conclure en tournant les talons.
Mais il sentit la puissante pression qu’elle exerçait autour de son bras pour l’empêcher de partir. Il avait vraiment mal, mais il était hors de question de laisser paraître quoi que soit devant elle. Dans tous les débats dans lesquels ils s’étaient livrés, le rapport de force avait toujours été en faveur de Lana. C’est pourquoi il s’efforçait toujours de dissimuler ses faiblesses face à elle.
- Si on n’était pas à un mariage avec tenue irréprochable exigée, je n’aurais pas hésité une seule seconde à te mettre la correction que tu mérites pour m’avoir parlé sur ce ton ! Lança-t-elle, des étincelles flamboyantes dans les yeux.
- Vas-y, te gêne pas ! Peut-être que ça calmera ta crise d’hystérie !
- C’est toi qui es hystérique, Ulrich ! Sauf que tu dissimules ça en tentant de te sauver ! Je suis inquiète pour toi,
merda !
Ses origines italiennes héritées de son père ressortaient toujours quand elle arrivait au bout de sa patience.
- Et moi je me tue à te dire qu’il n’y a aucune raison pour que tu t’inquiètes ! Je vais bien !
- On s’est toujours promis de ne pas avoir de secret l’un pour l’autre, Ric. Et te voir me mentir effrontément me déçoit énormément.
- Et bien mets-moi ma raclée ! Qu’est-ce que t’attends ?!
- Non… Je ne te ferai pas ce plaisir.
Puis elle le jeta à terre sans ménagement en le traitant de «
grullo ». L’atmosphère pesante s’alourdissait avec le silence qui régnait entre eux. La tension était palpable, et chacun débordait de sentiments forts et contradictoires.
Les fesses toujours sur le sol frais, Ulrich finit par réagir.
- Je sais que tu fais ça parce que tu m’aimes. Et je te remercie de te préoccuper de moi, mais… Ce n’est plus nécessaire maintenant. Les choses ont changées… J’ai changé !
- Dans ce cas, pourquoi ne m’as-tu pas laissé dire la vérité devant Yumi tout à l’heure ?
- Parce que… Ce n’était pas… le moment.
- Et quand est-ce que ça le sera ?
- Euh… Et bien…
Il ne savait comment achever sa phrase, car lui-même n’était pas sûr de vraiment le savoir.
- C’est justement le fait que tu ne puisses pas répondre à cette simple question qui m’inquiète, Ulrich.
- Lana… Je sais que je te dois beaucoup… Tu es l’une des personnes les plus importantes de ma vie… Et je ne te serai jamais assez reconnaissant de tout ce que tu as fait pour moi…
- Ce n’est pas le moment d’être sentimental, minus.
- Je ne fais que dire ce que je pense.
- Tant mieux… Ça change.
- Lana…
- Non, c’est bon. Restons-en là.
Elle marqua une pause.
- Et… oui, tu as raison : je tiens beaucoup à toi.
Puis, de sa démarche toujours aussi altière, elle se mit en route vers le lieu de réception sans prendre la peine de l’aider à se relever.
Contrairement à sa cousine, il avait la tête basse, tandis qu’il reprenait appui sur ses jambes. Son esprit était focalisé sur la dispute qu’ils venaient d’avoir. Malgré cela, il parvenait à se diriger vers sa destination.
Plus ses pas s’en rapprochaient, plus il s’efforçait de retrouver le même sourire qu’il arborait avant de quitter Yumi, mais les mots de Lana le taraudaient toujours : « silence »… « Mensonge »… «
grullo ».
Grullo ? Tu as sans doute raison, Lana. Je suis peut-être bien un imbécile.
Je comprends pourquoi tu peux penser ça… Mais toi ? Es-tu sûre de me comprendre?Il garda toutes ces interrogations pour lui et s’empressa de rejoindre Yumi.
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En espérant que ça vous a plu et à très bientôt pour une autre suite (tout aussi intrigante) !

Pardon pour cette très longue absence et merci à tout ce qui m'ont laissé un message et auxquels je n'ai pas répondu.
J'espère que vous aimerez cette suite qui va marquer un vrai tournent dans mon histoire.
Bonne lecture ! ^_^
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Aujourd’hui
Du côté de la réception, les convives commençaient déjà à former les couples, se préparant à l’apothéose de cette si belle journée. Isolé, Sebastian les observait tous en sirotant son verre de jus de fruit.
[i]Bon sang ! J’ai hâte de rentrer, moi ! [/i]
En effet, dur de passer un bon moment si personne ne daigne vous adresser la parole.
A part sa nièce, Lana, et quelques compliments mielleux sur sa prestation au violon accompagné de son fils, aucun des autres invités n’avaient pris la peine d’engager une conversation avec lui. Il y aurait bien eut sa femme, mais cette dernière trop polie et sociable - contrairement à lui - s’était lancée dans le rituel incontournable des présentations de la famille nouvellement unifiée. Au bout d’un moment, il ne put supporter d’avantage ces usages horriblement surfaits, à son goût, et laissa Jeanne à sa sœur pour les poursuivre.
Il avait parfaitement conscience de faire « tapisserie », mais ça… Il en avait l’habitude. Le rôle d’observateur ne lui déplaisait pas, au contraire. Toute sa vie, il s’était diverti en analysant scrupuleusement le comportement de ses semblables.
Comment distinguer un hypocrite de quelqu’un de sincère ? Comment voir qu’un être est sain d’esprit et un autre dérangé ? Comment distinguer le vrai du faux ?
Il fallait avouer qu’il était plutôt doué dans ce genre d’exercice.
- Chéri !
- Ah, te voilà ! Je croyais que j’allais danser tout seul !
- Mais voyons, Seb ! Arrête un peu de dire des bêtises, veux-tu ? Lui rétorqua-t-elle en plaisantant.
Malheureusement pour lui, elle n’était pas seule : elle était arrivée, flanquée de sa sœur et de son nouveau beau-frère.
- Sebastian ! Comment allez-vous ? Lui demanda ce dernier d’un ton enjoué. Enfin je dis « vous », mais on pourrait peut-être passer au « tu », non ?
Un « non, je ne crois pas » à peine audible lui échappa des lèvres. Seule Jeanne l’entendit et l’étouffa avec un léger coup de coude dans les côtes en rattrapant rapidement avec un sourire délicieux et diplomate.
- Mais oui, bien sûr qu’il en serait ravi. Elle tourna sa tête vers lui avec un air menaçant. N’est-ce pas, Sebastian ?
- Oui… Bien sûr. Tout à fait ravi. S’efforça-t-il de confirmer.
- Tu es toujours au jus d’orange, Sebastian ? Fit remarquer Stephan. Le champagne n’est pas à ton goût ?
- Oh non… Ce n’est pas ça…
- Depuis que je le connais, je ne l’ai jamais vu boire une seule goutte d’alcool. Interrompit Célia.
- Je vois. C’est pour des raisons… Religieuses ?
Si leur sens de la diplomatie n’était pas aussi fort, Jeanne aurait littéralement éclaté de rire tandis que Sebastian aurait répliqué qu’il ne croyait pas à « toutes ces conne… foutaises ». Mais diplomatie oblige : la politesse était de mise.
- Loin de là. Je dois t’avouer que Dieu et moi ne nous sommes jamais vraiment bien entendus.
- Tu es athée ?
- Est-ce un crime ?
- Non, bien sûr que non, je ne te juge pas. Je me posais juste la question, c’est tout.
- Et bien tu as eu ta réponse. Riposta sèchement Sebastian.
- En tout cas, tu sembles avoir déteint sur ma petite sœur. C’est vrai Jeanne, tu n’as pas bu une seule coupe de champagne de toute la journée.
La concernée parut légèrement gênée.
- Oui, c’est vrai. Il faut croire que je n’en avais tout simplement pas envie.
- Il faut croire que oui. Répéta Célia avec un soupçon de suspicion dans la voix.
- Le bal n’est-il pas sensé bientôt débuter ? Intervint Sebastian de manière chevaleresque.
- Tu as raison. Allons nous préparer, ma chérie. S’enquit Stephan.
Et ils s’éloignèrent aussitôt.
- Merci. Dit simplement Jeanne.
- De quoi ?
- Ne fais pas l’innocent, tu vois très bien ce dont je veux parler.
- Tu veux dire ce dont tu « ne veux pas parler », justement.
- Nous avons déjà eu cette conversation. Ce n’est ni le lieu, ni le moment.
- Je sais que nous avons encore des… choses à clarifier, Jeanne. Mais tu aurais pu au moins mettre ta mère et ta sœur dans la confidence. Elles n’ont pas cessé de demander de tes nouvelles, au cours de la journée.
- Et elles en auront. Mais pas aujourd’hui : le débat est clos.
Son ton ferme et définitif le dissuada de poursuivre.
- Bien. Dans ce cas, tâchons de bien nous amuser pendant le bal.
- Tu as raison. J’espère que tu danses toujours aussi bien. Lui lança-t-elle avec un ton de défi.
- Tu en doutes ?
- Non, je te taquine.
- En parlant de « s’amuser », où sont Ulrich et Yumi ?
- Je ne sais pas. Ça fait un moment que je ne les ai pas vus. J’imagine qu’ils ont voulus rester un peu tranquilles.
- Je suis là ! Indiqua Yumi, devinant qu’ils la cherchaient du regard.
- Ah ! Quand on parle du loup ! Plaisanta Jeanne.
- Ulrich n’est pas avec toi ? L’interrogea Sebastian.
- Non, il est avec Lana. Je crois qu’ils avaient besoin de se parler.
- Ah, Lana ! Soupira la mère d’Ulrich. Elle ne peut pas s’empêcher de jouer les « grandes cousines » !
- Oui, pauvre garçon ! Quand ce n’est pas toi qu’il a sur le dos, c’est sa cousine qui prend le relais. Fit Sebastian.
- Hé ! Je ne suis pas « sur son dos » comme tu dis ! Et puis tu peux parler, toi !
- Excusez-moi de vous interrompre. Intervint la japonaise amusée. Mais est-ce qu’ils ont toujours étaient… Aussi proches.
- Oui. Depuis tout petits déjà ils partageaient une relation assez fusionnelle. Confirma Jeanne nostalgique. Ma sœur et moi en étions ravies !
- C’est vrai. Bien qu’elle ait plusieurs petits frères qu’elle adore, malgré toutes les plaintes qu’elle puisse formuler, Ulrich tient une place équivalente, si ce n’est plus importante pour elle.
- Et c’est réciproque, bien entendu. Ils ont beau encore se chamailler comme des gamins, Ulrich ne jure que par elle ! Renchérit Jeanne.
- Oui, j’ai pu le constater il y a quelques heures. Rit Yumi en faisant référence à la scène à laquelle elle avait assisté juste après sa rencontre avec Lana.
Avant cette conversation, elle devinait déjà la complicité qui unissait son petit-ami à sa cousine. Mais ce qu’elle ignorait, c’était son intensité. Et bien que cela lui parut stupide et immature, un faible sentiment de jalousie commença lentement à poindre en elle. Elle secoua vivement la tête, comme pour s’extraire à cette pensée absurde, avant de reprendre le fil de la conversation avec ceux que son petit frère, Hiroki, s’amusait à surnommer « ses futurs beaux-parents ».
- Ça suffit, Lana ! Arrête de te mêler de mes affaires !
La discussion avait dégénéré. La jeune Deblois avait, sans le vouloir, attisé une flamme qui n’avait pas tardé à engendrer une véritable explosion.
- Tu comptes revenir en arrière, Ulrich ?! Garder le silence ?! Ou plutôt laisser le silence te garder en otage ! S’insurgea-t-elle avec une colère dans laquelle on pouvait déceler de l’inquiétude.
- Tout ça, c’est terminé maintenant ! Je vais bien, ok ? Et si je n’ai pas envie d’en parler c’est mon droit !...
- Oui, peut-être. Mais tu n’as pas celui de m’impliquer dans des mensonges !
- C’est pour cette histoire avec Maxence que tu me fais tout un plat ?!
- Oui ! Et c’est aussi parce que je constate que ça fait des années que tu me mens ! Des années que tu TE mens, Ric !
- Je ne mens à personne.
- Ne rien dire, c’est mentir par omission !
- Ne joue pas les procureurs avec moi, veux-tu ! J’y ai déjà droit quand mon père me fait des reproches, je n’ai pas besoin que tu t’y mettes aussi !
- Il faut bien que quelqu’un le fasse, Ric ! Ne pas vouloir en parler est une chose, la dissimuler en est une autre. C’est parce que tu n’es pas en paix avec toi-même que tu ne dis rien, pire : que tu racontes des mensonges…
- Je n’en ai dit qu’un seul, putain ! Lâche-moi, maintenant ! Explosa Ulrich qui commençait à être à bout.
- Je te connais bien. La vulgarité est ton arme quand tu sais que tu as tort ou que tu n’as rien d’autre à ta disposition pour te justifier.
- Je n’ai pas à me justifier de quoi que ce soit ! Je n’ai pas à faire étalage de ma vie à mes amis ou à ma copine juste parce que tu t’es autoproclamée psychiatre !
- Je ne prétends pas être « psy », Ulrich. Mais ce dont je suis sûre, c’est que je sais que quand tu enfouis tes sentiments… Tu souffres, comme je n’ai jamais vu personne d’autre souffrir autant dans toute mon existence !
Sa voix était partie dans les aiguës, à la limite des sanglots. Ceci révélait que sous sa force et son charisme impressionnant se cachait une fragilité que peu de gens lui connaissait. Son cousin était une des rares personnes à savoir ce qui se cachait sous l’élégance et le sarcasme qu’elle dégageait constamment.
- Je ne te fais pas la moral sur « mentir c’est mal » ou je ne sais quelle autre baliverne ! Je ne veux pas que tu reviennes en arrière, Ulrich ! Ce n’est pas ce que Matt aurait voulu !
- Arrête de parler de ça !
- Ah ! C’est encore pire que ce que j’imaginais ! Fit-elle en lâchant un rire nerveux. Tu as carrément des œillères, mon pauvre vieux !
- Ça suffit ! J’en marre de t’entendre débiter toutes tes conneries ! Essaya-t-il de conclure en tournant les talons.
Mais il sentit la puissante pression qu’elle exerçait autour de son bras pour l’empêcher de partir. Il avait vraiment mal, mais il était hors de question de laisser paraître quoi que soit devant elle. Dans tous les débats dans lesquels ils s’étaient livrés, le rapport de force avait toujours été en faveur de Lana. C’est pourquoi il s’efforçait toujours de dissimuler ses faiblesses face à elle.
- Si on n’était pas à un mariage avec tenue irréprochable exigée, je n’aurais pas hésité une seule seconde à te mettre la correction que tu mérites pour m’avoir parlé sur ce ton ! Lança-t-elle, des étincelles flamboyantes dans les yeux.
- Vas-y, te gêne pas ! Peut-être que ça calmera ta crise d’hystérie !
- C’est toi qui es hystérique, Ulrich ! Sauf que tu dissimules ça en tentant de te sauver ! Je suis inquiète pour toi, [i]merda[/i] !
Ses origines italiennes héritées de son père ressortaient toujours quand elle arrivait au bout de sa patience.
- Et moi je me tue à te dire qu’il n’y a aucune raison pour que tu t’inquiètes ! Je vais bien !
- On s’est toujours promis de ne pas avoir de secret l’un pour l’autre, Ric. Et te voir me mentir effrontément me déçoit énormément.
- Et bien mets-moi ma raclée ! Qu’est-ce que t’attends ?!
- Non… Je ne te ferai pas ce plaisir.
Puis elle le jeta à terre sans ménagement en le traitant de « [i]grullo[/i] ». L’atmosphère pesante s’alourdissait avec le silence qui régnait entre eux. La tension était palpable, et chacun débordait de sentiments forts et contradictoires.
Les fesses toujours sur le sol frais, Ulrich finit par réagir.
- Je sais que tu fais ça parce que tu m’aimes. Et je te remercie de te préoccuper de moi, mais… Ce n’est plus nécessaire maintenant. Les choses ont changées… J’ai changé !
- Dans ce cas, pourquoi ne m’as-tu pas laissé dire la vérité devant Yumi tout à l’heure ?
- Parce que… Ce n’était pas… le moment.
- Et quand est-ce que ça le sera ?
- Euh… Et bien…
Il ne savait comment achever sa phrase, car lui-même n’était pas sûr de vraiment le savoir.
- C’est justement le fait que tu ne puisses pas répondre à cette simple question qui m’inquiète, Ulrich.
- Lana… Je sais que je te dois beaucoup… Tu es l’une des personnes les plus importantes de ma vie… Et je ne te serai jamais assez reconnaissant de tout ce que tu as fait pour moi…
- Ce n’est pas le moment d’être sentimental, minus.
- Je ne fais que dire ce que je pense.
- Tant mieux… Ça change.
- Lana…
- Non, c’est bon. Restons-en là.
Elle marqua une pause.
- Et… oui, tu as raison : je tiens beaucoup à toi.
Puis, de sa démarche toujours aussi altière, elle se mit en route vers le lieu de réception sans prendre la peine de l’aider à se relever.
Contrairement à sa cousine, il avait la tête basse, tandis qu’il reprenait appui sur ses jambes. Son esprit était focalisé sur la dispute qu’ils venaient d’avoir. Malgré cela, il parvenait à se diriger vers sa destination.
Plus ses pas s’en rapprochaient, plus il s’efforçait de retrouver le même sourire qu’il arborait avant de quitter Yumi, mais les mots de Lana le taraudaient toujours : « silence »… « Mensonge »… « [i]grullo[/i] ».
[i]Grullo ? Tu as sans doute raison, Lana. Je suis peut-être bien un imbécile.
Je comprends pourquoi tu peux penser ça… Mais toi ? Es-tu sûre de me comprendre?[/i]
Il garda toutes ces interrogations pour lui et s’empressa de rejoindre Yumi.
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En espérant que ça vous a plu et à très bientôt pour une autre suite (tout aussi intrigante) ! :D